Pourquoi le tirage au sort permettrait un choix reposant plus sur les programmes.
Si les candidats doivent convaincre un nombre limités d’électeurs (disons 1000 pour avoir de fortes chances d’avoir des écarts nets dans les résultats) les règles du jeu changent. D’autant plus que les économies permises parmi la suppression des bureaux de votes et du financement de campagnes électorales massives, serviraient à payer des séminaires résidentiels aux électeurs. Ces séminaires permettraient pendant une semaine par exemple, de regrouper les électeurs qui se consacreraient à plein temps à l’étude des candidatures. Se sentant investis d’une responsabilité plus lourde et ayant plus de moyens (temps et accès aux candidats), les électeurs tirés au sort feraient un travail plus sérieux que les électeurs actuels.
Comment développer le tirage au sort des électeurs.
Deux questions se posent ici :
– comment en pratique cela marcherait ?
– comment faire accepter un tel système ?
Comment en pratique cela marcherait ?
Dans les commentaires des sondages, on entend parfois « qui ils ont interrogé ? En tout cas, pas moi ! ». Il y a un risque de suspicion sur l’honnêteté du tirage au sort. IL faut donc une procédure entièrement vérifiable par tous. Une solution serait la suivante : établir d’abord une liste d’électeurs « tirables », liste avec les noms classés par ordre alphabétique. Une fois établie le nombre de personnes que l’on veut tirer au sort (ce nombre dépend notamment du niveau de fiabilité statistique acceptée), il suffit de tirer au sort la première personne « élue ». Si on décide par exemple que l’on prend 1 électeur sur 2000, il suffit de faire un seul tirage sur les 2000 personnes de la liste. Ensuite, il suffira de prendre toutes les personnes qui sont distantes sur la liste de 2000 noms. Pour tirer cette première personne, une procédure informatique risque d’être là aussi perçue comme manipulable. On peut alors faire comme pour le loto : un tirage de boules. Pour que chacun puisse vérifier que tous les noms sont bien présents, il vaut mieux faire un tirage en deux temps. Par exemple. Dans un premier, faire 20 tirages d’une boule parmi 100 (correspondant à un découpage de la liste de 2000 noms en 20 blocs), puis un tirage d’une boule parmi les 20 présélectionnées.
La procédure décrite est parfaitement transparente et repose entièrement sur le hasard.
Comment faire accepter un tel système ?
Même avec toutes les garanties du monde, beaucoup de gens risquent de considération qu’il s’agirait d’un vol de leur droit démocratique premier. D’autre part, tous ceux qui auraient à perdre à l’instauration d’un système sans distorsion de l’électorat et où le vote reposerait sur une implication forte de l’électeur s’y opposeront. L’instauration d’une telle procédure de désignation des électeurs ne peut être progressive.
Une solution serait de proposer cette procédure dans des élections ayant une très forte abstention (celles des étudiants au CNOUS : plus de 90 %) et dans des d’institutions purement consultatives (exp. comités d’usagers) notamment celles concernant une population traditionnellement abstentionnistes : les jeunes. L’assemblée des enfants pourrait ainsi être élue sur ce mode de scrutin. Si’ l’on envisage l’abaissement de l’âge de vote, on pourrait commencer par l’instauration d’un conseil consultatif des pré-électeurs, conseil dont les représentants seraient élus après tirage au sort des électeurs.
En habituant les jeunes à ce mode de scrutin, on prépare les électeurs de demain à un mode de scrutin plus juste et plus adapté à des choix complexes.
Crédit image : auteur et Sud-ouest.
Références :
- Chouard, D. (2013), Pas de démocratie digne de ce nom sans tirage au sort pour que nos représentants restent nos serviteurs, http://etienne.chouard.free.fr/Europe/tirage_au_sort.php
- Marquis, L. (2008), Sondages d’opinion et communication politique, Cahiers du CEVIPOF, 38.
Ça me rappelle cette vidéo du même Étienne Chouard:
http://www.youtube.com/watch?v=opxbFy7xCgM
Intéressant dans le principe, et qui donne envie toujours d’essayer ‘pour voir’; après je suis très loin de partager son point de vue sur la plupart des sujets.
Merci pour le lien. Ce qui est “amusant”, c’est que ma réflexion est partie d’une question économique “voter, ça a un coût pour l électeur et pour l’ Etat” et en lisant Chouard je me suis rendu compte que le vote lui-même était lié aux dysfonctionnements de nos démocratie.
Je ne serai pas contre une part d ‘élus tirés au sort mais je crois que le tirage au sort de tous les élus n est plus adapté à des sociétés avec des appareils étatiques aussi complexes que les nôtres. D’autre part, je trouve que Chouard idéalise un peu la démocratie Athénienne, société avec pas mal d exclus de la vie politique : femmes, esclaves, étrangers. Donc, finalement, même à Athènes, le pouvoir n était pas laissé entre les mains de n’importe-qui. A mon avis, on a aussi besoin d’expertise et d’expérience pour bien gouverner.
un petit ouvrage d’Histoire en lien avec l’interview de son auteur : http://www.telerama.fr/idees/du-tirage-au-sort-au-suffrage-universel-la-grande-histoire-des-affinites-electives,111937.php